J'étais Salier. 

Heureusement, c'était une fausse alerte. Personne n'essayait de forcer la porte, ou alors ils étaient déjà morts... Je me retournais vers Jean de York, mon esprit fourmillant de questions. 

-Amy n'a pas pu intervenir assez vite. T'étais déjà mort. Du coup, tu es revenu, quelques mois plus tard, par chance, la mémoire totalement effacée. Amy était là, dès ce que tu considérais comme le début de ta mort. Alors qu'en réalité, tu était là depuis bien plus longtemps... Alors, je me suis concerté avec Amy pour savoir ce qui était de mieux pour toi, et on a trouvé la meilleure solution : effacer Salier de la mémoire collective. Au profit de son frère, certes. On a étouffé l'affaire. Waldstein n'a jamais été dénoncé. Il a continué ses agissements en douce. C'était le prix à payer. Et puis, Amy t'a suggéré de rentrer dans la maison Lancaster, je me trompe ? 

-Non. Je lui ai répondu que je n'étais pas de sang royal. Quand je suis allé me présenter à Martin d'Hampshire, ce jour-là, j'avais l'impression qu'il revoyait un vieil ami... 

-C'était risqué. Heureusement, d'Hampshire a accepté ta candidature, non sans demander l'avis de Waldstein. Vois-tu, Waldstein semblait tout à fait heureux de voir reparaître un Salier dont la mémoire avait totalement disparue. Parce que si ses sinistres agissements étaient révélés, tout pouvait être mis sur le dos de Salier, qui, lui, ne pourrait pas dénoncer Waldstein, faute de preuves. Il était donc essentiel que ça soit toi, et pas n'importe quel autre Lancaster, qui retrouve Amy à Antisalem. Car c'était toi qui avait le plus besoin de ces informations. 

-Dans ce cas-là, tout est bien qui finit bien, non ? 

-Non. Parce qu'on a tout raté. C'était un fiasco. On a été berné - et par beaucoup plus puissant que nous. Je l'ai appris il y a quelques heures seulement, alors qu'Amy me faisait relâcher. Je ne sais pas ce qui m'a poussé à regarder dans ses poches. Membre impériale de l'Ordre des Premières Familles. 

-Oui, et alors ? 

-C'était une vengeance personnelle que recherchait Amy. Elle n'a absolument aucune envie de laisser Waldstein vivre, pour que nous puissions le punir. Elle veut uniquement sa vengeance personnelle. Et, malheureusement, c'est nous qui trinquons. 

-Je ne comprends toujours pas... 

-Tu connais ça, un membre impérial de l'Ordre des Premières Familles, qui assassine un Sage de Néosalem ? Non. Et tu sais qui d'autre figure sur la liste d'attente des membres impériaux de l'Ordre des Premières Familles ? 

-Non. 

-Faut pas se creuser trop la tête. L'autre Salier. C'était prévu dans le plan. Amy faisait partie de l'Ordre Impérial des Premières Familles. Waldstein voulait se débarasser d'Amy, et Salier accéder à l'Ordre. Waldstein allait donc déterrer un scandale pour la neutraliser... Mais maintenant qu'elle est en train de l'assassiner, je crains que ce n'est plus essentiel. 

-Mais il devait bien avoir un scandale tout chaud, Waldstein, non ? 

-Justement, il a découvert quelque chose sur Amy. Je ne sais pas quoi... Et ça, il faut le trouver. Tous les criminels doivent être punis, même ceux qui servent les Premières Familles. Amy compris. 

-Tu me dégoutes. Il y a quelques minutes, tu étais un de ces criminels. 

-J'ai commencé ma punition, rétorqua Jean.

De nouveau, il était froid, glacial. Ce n'était pas le Lucius que je connaissais. Mais connaissais-je vraiment n'importe lequel de mes compatriotes ?