Je regardais Laspérides. En tant que Grand Recteur, c'était à lui de placer ma couronne sur ma tête, et il le fit avec un large sourire aux lèvres. Elle avait été portée, des années auparavant, par Sekhmet, et était très lourde, mais magnifique, inspirée de celle d'Angleterre. Le discours était très sobre, à l'identique de celui qui avait fait de Sekhmet nos impératrice plus d'un millénaire auparavant. 

-Monsieur George Paul de Boutrand, comte de Conti, Grand Evêque de Strasbourg, je fais de vous, par la Loi des Quatre Dieux, Empereur de l'Empire des Premières Familles, de ses 14 provinces et de ces milliers de sujet. 

Je me levais avec la couronne sur la tête. 

La veille, je n'étais presque rien. Maintenant, j'étais la plus haute autorité. Maintenant, libre à moi de faire ce que je voulais faire de mon Empire... Les gens m'acclamaient, mais ne me connaissaient pas. Les Bourbons semblaient sincères, Wallenstein aussi, et, devant moi, Laspérides était aux anges. Je serrais la main de Verset et de Blayis, avant de me retourner vers le public. 

Une semaine s'était écoulée depuis la mort de Rockfeller. Les évènements de la suite avaient été assez rapides - Verset, Blayis et Laspérides ont considérés que j'étais le meilleur choix pour son remplacement, comme j'étais l'un de ceux qu'il avait rappelé, ce jour-là, en sortant du tribunal. 

-Peuple de l'Empire ! 

Ma voix portait dans la Cathédrale Sainte-Arlette, devant la statue de Sekhmet - je m'imaginais que j'en aurais une, un de ces jours, à côté d'elle, à veiller sur l'Empire. 

-Il était temps ! Le renouveau, qui est incarné par ce nouvel Empereur, est bien là - vous l'avez réclamé après si longtemps... Je me mettrais aux activités politiques dès mon retour d'un tour de l'Empire. Je passerais partout - monsieur de Verset m'a dit que j'étais très attendu à Marnossa... 

Je regardais autour de moi. 

-J'invite tout l'Empire à se lever avec moi ! Contre l'Ennemi ! Contre les traîtres ! Contre les Dernières Familles ! 

Les gens m'applaudirent. 

C'était incroyable. J'avais gagné leur confiance, leur pouvoir, grâce à un meurtre, grâce à des trahisons... Je ne savais pas qui remercier - Rockfeller d'avoir tué Sekhmet ou Wallenstein d'avoir tué Rockfeller ? Les deux avaient tués l'enfant le plus puissant de l'Empire... 

Je passais à travers la foule, puis retrouvais Blayis à la sortie. 

-Y a-t-il des choses dont je dois être mis au courant ? demandais-je. 

-Rockfeller m'a légué Larme de Gouffre, dit-il. J'aimerais y transférer Saint Paul. 

-Vous pensez que c'est judicieux ? 

-Il sera plus en sécurité là-bas, croyez-moi. Et Carlier aussi, si ça ne posait pas de problème... On y enfermait tous les ennemis de Rockfeller, quand il y était encore. 

-Ca sera fait. 

Il me laissa, et partit rejoindre Verset. 

Je remarquais Wallenstein, adossé à une colonne. 

-Boutrand, je voulais vous dire quelque chose concernant... 

-Notre arrangement ne tient plus, Wallenstein. Je suis l'Empereur des Premières Familles. Et j'ai du travail. 

Il me regarda, et dans ses yeux je pouvais lire une furie incroyable. Il avait été si près du but, mais avait négligé l'inconnue la plus importante de l'équation. 

J'étais Empereur. Pourquoi léguer le pouvoir. 

FIN D'IMPERATOR