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Des histoires de Seuls
De Abby_From_The_Abyss — 25 mars 2019 à 07h55
Chez les vivants... (3/5: La négociation) 
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Le jeune homme inspira un grand coup. Face à lui, la porte menant au bureau de son supérieur. Il avait demandé à lui parler. C'était très important. Mais ce n'en était pas moins intimidant. Rassemblant tout son courage, il frappa à la porte. 

 

"Entrez" répondit une voix fatiguée et désintéressée

 

Le jeune s'exécuta. Il fit un pas dans la pièce et ferma la porte derrière lui. 

 

"Ah, c'est vous" le chef se redressa sur son siège "De quoi vouliez-vous me parler ?" 

"C'est au sujet du dossier Gersh. Vous savez, la famille morte dans un accident de voiture" 

"Oui, quoi donc ?" 

"Je pense que ce n'était pas un accident" 

"Allons bon !" 

"Je suis sérieux, chef !" 

 

Le jeune se tint aussi droit que possible et verrouilla son regard avec celui de l'homme en face de lui. Le supérieur soupira. 

 

"Vous les jeunes," maugréa-t-il "Vous voulez toujours que tout soit incroyable, trépidant ! Le goût de l'aventure, tout ça..." 

"Je vous le redis, monsieur, je suis sérieux" 

"Et qu'est-ce qui vous amène à penser cela ?" 

"Nous savons que le père trempait dans des affaires louches. Et étant donné sa position, il se peut que la famille ait eu des ennemis" 

"Je suis au courant" 

"Clairement, la famille est partie dans la précipitation : ils portaient encore leurs pyjamas" 

"Hm-hmm ?" 

"Ce que je pense, c'est que leur mort n'est pas si accidentelle que cela ! Je pense qu'il faut réouvrir le dossier. Il doit y avoir des éléments qui nous échappent" 

 

Le supérieur souffla. Il se redressa à nouveau et roula des yeux. 

 

"Vous insinuez que quelqu'un aurait provoqué cet accident ?" 

"Cela me semble plausible" 

"Et comment ? En posant une peau de banane sur la route ?" 

Le policier grimaça "Je trouve votre remarque déplacée, monsieur"

 

Le chef soupira. Il se releva et fit le tour de son bureau pour se mettre face à son subordonné. 

 

"La famille a eu un accident de voiture et ils sont tous morts dans ce même incident" déclara-t-il "Qu'ils aient dû partir dans la précipitation ou non, cela n'a aucune importance. Cet événement est tragique, je vous l'accorde, mais il n'y a rien de plus à en tirer" 

"Monsieur, s'il-vous-plaît ! Si quelqu'un a tué cet homme, cette femme et cet enfant, il faut le punir ! Il faut que justice soit faite !" 

"Bon, ça suffit maintenant !" l'homme était clairement énervé à présent "Nous avons mieux à faire que nous attarder sur des cas mineurs ! Dois-je vous rappeler cette petite fille retrouvée morte dans la rue ? Clairement, elle, sa mort n'est pas un accident. Et nous n'avons encore aucune piste ! Alors retournez à votre travail, Viktor ! Et cessez de jouer les héros !"

 

Le policier voulut protester. Il chercha une remarque, une réplique, un élément qui prouverait que le cas de la famille du jeune Yvan n'était pas un accident. Et qu'il était nécessaire de s'y intéresser davantage. Il finit par laisser tomber et sortit du bureau. 

Néanmoins, il n'avait pas changé d'avis. De retour à son propre bureau, il fouilla un peu les papiers et sortit un mail imprimé. Il ne l'avait pas montré à son chef car il pensait que cela ne ferait que le décrédibiliser. Un témoin anonyme, une déposition digne d'un film de science fiction, des descriptions précises et pourtant difficiles à croire... 

 

"Des hommes en noir qui inspectent la carcasse de la voiture" relut le policier, comme pour se convaincre lui-même "Comment je vais lui faire croire ça, moi ?" 

 

Il reposa le papier et plaqua ses mains sur son visage. Il ne savait pas combien de temps ça lui prendrait, mais il réussirait à faire prendre conscience à son chef que l'affaire n'est pas aussi simple que cela. Elle ne peut pas être aussi simple que cela. 

Il gardait cela au plus profond de lui, mais il n'oubliait pas les papiers étranges qui traînaient autour de la voiture. L'écriture cyrillique lui revenait à l'esprit chaque fois qu'il y pensait. Comme pour se rassurer qu'il n'avait pas rêvé, il sortit son carnet de notes personnel. Il avait réussi à s'accaparer ces fameux papiers et s'était lancé dans une traduction de ceux-ci. Il n'avait pas parlé russe depuis des années mais cela lui semblait nécessaire. Et si personne ne le ferait, lui le ferait. 

Cela restait un vrai casse-tête, hélas. Que voulait donc dire "quinze familles"

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