erUn vent sans fraîcheur ni chaleur s’était mis à souffler légèrement, couchant l’herbe autour du tapis sur lequel les sages s’étaient assis, lorsqu’ils entendirent des pas qui les rejoignaient. Ils n’y prêtèrent pas attention avant qu’une voix ne les accompagne :

- Cette journée est vraiment magnifique, vous ne trouvez pas ?

Éloi et Diane tournèrent la tête pour saluer la nouvelle venue, tandis que Lucius déglutissait ; il suivit le geste de ses collègues tardivement, ayant eu le temps de rassembler ses pensées :

- Oh, non non non non non, marmonna-t-il, un sourire nerveux au coin des lèvres. Photis, je t’aime, mais si tu viens pour nous avertir que nous devons nous rendre à une réunion d’urgence ou quelque chose de cette espèce, je t’assure que je vais t’en vouloir.

- Bonne nouvelle, répliqua-t-elle en haussant un sourcil, je vous rends seulement visite parce qu’on m’a dit que vous étiez là. Et il se trouve qu’il y a longtemps que je n’ai pas observé le panorama depuis les jardins du palais, alors j’ai simplement saisi l’occasion.

- En vérité ?

- En toute vérité, excellence.

Diane, qui s’était remise sur son séant avec appréhension, se détendit avec un soupir à moitié riant, alors que Lucius hochait la tête, soulagé lui aussi. La sage se leva pour aller prendre le bras de Photis et la conduire vers les rambardes, sur lesquelles le soleil triomphant dans le ciel sans nuages déposait une fine lueur dorée. Les deux jeunes femmes parlaient tranquillement, l’émissaire épargnant les affaires du palais, sachant le repos rare pour le triumvirat ; et la paix rayonnant sur les traits de Diane disait assez sa reconnaissance pour une telle précaution. Tandis que Lucius les regardait, pensif, parcourant du pouce le rebord d’une page, il sentit Éloi se pencher vers lui, un sourire dans sa voix lorsqu’il lui glissa :

- Je ne veux pas chipoter, mais il me semble clairement t’avoir entendu dire «Photis, je t’aime».

- Veux-tu bien me laisser ? répliqua Lucius dans un chuchotement.

Le rire d’Éloi était trop sonore à son goût, il lui fit vivement signe, l’index sur ses lèvres, de baisser le ton.

- Je dis ça, je ne dis rien, s’amusa l’autre sage en lissant les plis de sa toge, reposant sur le tapis.

- Eh bien tu ferais tout aussi bien de te taire.

- Quoi donc, j’aurais visé à côté ?

- Silence.

- Allons, Lucius...

Il eut au moins la bonne grâce de se taire, abandonnant son air de confidence taquine pour un sourire tranquille, lorsque les deux autres revinrent