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Théories des Limbes
De Le Maître Sain — 16 mars 2021 à 00h43
Le Ravage de Seuls…
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Les liens entre Ravage et Seuls ? Ils s’articulent principalement autour de 3 axes :

 

1) Post-apocalypse

2) Nouvelle société

3) Groupe idéal

 

 

1) Post-apocalypse

Est présente l’idée de société futuriste post-apocalyptique, faisant suite à une guerre technologique de grande ampleur, avec des moyens jamais vus encore. L’électricité, source d’énergie principale, dépendance première, vient à manquer, toute communication est rompue, toute technologie est coupée, et le monde entier cesse de vivre. Les gens ne peuvent même plus rentrer chez eux ou se nourrir ; les matériaux se mettent même à ramollir sous l’effet d’une canicule terrible. Politique, économie, société…tout part en vrille. Les troubles explosent. Des comportements inouïs et dangereux sont observés. La confiance se perd. La haine est omniprésente. Dans les mégapoles géantes de 25 millions d’habitants comme Paris, les choses dégénèrent encore plus, des incendies mystérieux et de grande envergure ont lieu, sans doute à cause de la chaleur, décimant les derniers survivants de la guerre. Les pompiers ne peuvent même plus assurer le service, et les vannes d’eau sont à l’arrêt. L’eau potable est introuvable, le choléra explose. Bref, le chaos. La folie.

 

Hypothèses seuliennes :

⦁ La Nuit de la Disparition, une guerre a lieu, ou une expérience scientifique de grande ampleur, recourant à une arme sonique, et atteint Fortville. Les communications, les technologies, tout est bloqué, et, pour un monde qui y a recours H24, c’est l’horreur, la panique absolue. Le monde est détruit, Fortville incluse, et les gens fuient, laissant même leurs enfants derrière, rendus fous par les ondes. Certains enfants tués vivent une expérience cérébrale incroyable, exacerbée par les ondes de l’appareil : les Limbes. Elles ont depuis toujours existé, mais sont seulement accessibles à quelques élus, dans certaines circonstances. Le rôle de chacun(e) dans les Limbes dépend de ce qu’il ou elle a vécu cette nuit-là.

⦁ Le père d’Yvan, vraisemblablement très lié aux événements qui entourent l’utilisation de cette arme sonique, tente de fuir, mais trop tard. Cela veut dire que, pendant que nos héros se retrouvent dans les Limbes et vivent un peu leur revanche, la Terre est ravagée, et, symboliquement, ce ravage se retrouve à Fortville et dans le chaos qu’engendre Saul. Camille peut aussi l’incarner, dans un sens. Ainsi que certains enfants et leurs pouvoirs respectifs.

⦁ La chaleur, les incendies, les pompiers, l’eau, les phénomènes mystérieux dont Blanche est notamment frappée dans Ravage, se retrouvent totalement dans la série, à travers les personnages de Dodji, Camille, Saul, etc.

⦁ Les enfants tentent de survivre dans les Limbes comme les survivants le font sans doute encore sur Terre, comme s’ils intériorisaient leurs souffrances (d’où la théorie qu’ils sont peut-être eux-mêmes les projections de l’angoisse et de la détresse de survivants). La zombification a peut-être réellement eu lieu aussi sur Terre : accident nucléaire, épidémie, guerre biologique… Les animaux en ont peut-être gagné certains pouvoirs et certains droits d’entrée dans les Limbes… Annette et Zéphyr, les enfants du futur, savent peut-être ce qu’il se passe en ce moment, 9 ans après…

⦁ Au milieu de cette folie, de ce désordre, il faut de la sagesse.

 

 

2) Nouvelle société

Elle serait fondée sur les valeurs simples et profondes, refoulant le progrès technique et l’égocentrisme. Une sorte de vie communautaire organisée, établie, pacifique, avec des règles simples, strictes, mais saines. La civilisation serait principalement agricole, et en tirerait prospérité et autosuffisance. Un tel état humain pourrait augmenter et intégrer de plus en plus de monde, mais pas trop ! La polygamie est permise pour accroître le nombre de personnes aptes à travailler. La vie saine permet la croissance de la population et un bonheur généralisé.

 

Hypothèses seuliennes :

⦁ Une micro-société positive et organisée semble se dessiner autour de Dodji, dès le tome 4, Dodji dont la sagesse et le courage inspirent ceux qui l’entourent. Lui insiste sur la simplicité, le respect, la protection des uns et des autres, négligeant aussi le reste, comme l’école par exemple, reliquat du passé qu’il voudrait peut-être oublier, lui qui n’y est pas souvent allé. Une nouvelle société qui pourrait aussi apparaître à Moulin-Vallon, par la suite ? Sous l’égide à nouveau de Dodji ?

⦁ Le côté autoritaire mais aimant de Dodji fait de lui le patriarche de la petite famille, que l’expérience a durement formé très tôt. Cette micro-société augmente en nombre par la suite : de 13 (5 au départ !) à plus du double lors de l’alliance avec Saul, pour approcher une petite vingtaine lors de la fin du tome 7 et la fuite. Cependant, les récents événements à Néosalem apporteront un surplus de sans doute une petite centaine d’individus, voire plus, voire moins…tous esclaves en fuite d’un monde décalé et totalitaire, qui perd les pédales. Esclaves quo chercheraient la liberté, la société idéale pour s’épanouir.

⦁ Le côté anti-technologique n’apparaît qu’au tome 7 : le pouvoir des Terres Basses et des Dernières Familles s’active, laissant comme un message : il faut bannir le progrès technique, responsable de ce qui s’est passé sur Terre, et c’est ce qu’il manquerait à la communauté de Dodji pour être complète…cependant, cela leur poserait aussi pas mal de problèmes. Et qui voudrait faire équipe avec les Songe-Creux ?

 

 

3) Groupe idéal

Petit groupe de rescapés mené par une sorte de Patriarche courageux, sage, estimé et respectueux, inspirant confiance, opposé à d’autres groupes de nature plus ou moins violente et totalitaire. Certains tentent en effet de restaurer l’ancien ordre ou de produire un ordre nouveau en usant sans limites du régime dictatorial. Des micro-sociétés violentes et individualistes émergent donc un peu partout. D’où la nécessité de la fuite rapide des zones surpeuplées et périlleuses. Mais bien faire les choses prend du temps, et n’est pas une mince affaire ; à l’inverse, les caudillos qui se lèvent un peu partout proposent des solutions expéditives et meurtrières, pour régler le crime et les autres problèmes incontrôlables. D’autant qu’il faut se protéger des fuyards, pillards et brigands qui ne cessent d’attaquer le groupe, de jour comme de nuit. D’où la question de l’usage « légitime » de la violence qui se pose, d’autant qu’avec l’insécurité viennent aussi la faim, la fatigue, la marche, la peur, et même la folie, tant de choses à gérer. Arrivés au nord de la Provence et au sud du Dauphiné, dans le village natal de François et Blanche, le groupe pose ici sa base, dans ce cadre champêtre, vide, tranquille et beaucoup moins violent (beaucoup de villageois ont cependant péri avant leur arrivée). 

 

Hypothèses seuliennes :

⦁ Ce petit groupe de rescapés à la Sa Majesté des Mouches, mené par Dodji, confiant, prodigieux, se voit opposer un autre groupe violent et autoritaire, qui tente de sauver les enfants par la force et le retour au passé, proposant sur ces bases un ordre nouveau.

⦁ D’autres groupes surgissent aussi, face aux circonstances : une secte zombifiée et extrémiste vis-à-vis de la technologie, qu’elle abhorre, comme si elle voulait enterrer tout le monde avec elle, tout détruire pour punir, ce qui n’est pas non plus la solution.

⦁ Vient ensuite Néosalem, réplique du monde, réplique de tout ce qui a amené le monde terrestre à sa perte : violence, injustice, autoritarisme, inégalité, guerres, préjugés, incompréhension, froideur…

⦁ La meilleure solution reste la médiane, celle proposée par les Non-Alignés fortvilliens.

⦁ Ce qui caractérise Seuls, de la même manière, c’est la fuite. La recherche de tranquillité. À la vitesse et au n’importe quoi, ils opposent la douceur, la réflexion, acceptant les difficultés et ne déraillant pas lorsqu’elles se présentent. Ce qui est loin d’être le cas des autres sociétés.

⦁ Les mêmes problèmes de sécurité élémentaire se posent, mais, comme le dit Saul, la violence n’est-elle pas toujours légitime ? Dodji et les autres s’en servent parfois, mais…il faut des règles.

⦁ Il faut aussi gérer les crises, les autres, les différences… La peur, la folie, la faim, le ras-le-bol… Dodji le fait très bien, parfois un peu trop bien ?

⦁ Peut-on penser que la tranquille Moulin-Vallon, cadre idéal, se trouvera en Dauphiné-Provence ? ^^ Là, un modèle agricole se développera sans doute.

⦁ Cela rappelle que les Limbiques du passé ont peut-être, eux aussi, vécu des guerres à leurs époques respectives, et qu’ils tentent à leur manière d’y faire face, ainsi qu’aux conséquences des nouvelles.

 

 

Les personnages

 

L’Empereur, charismatique, despotique, belliqueux et séducteur, dirigeant de l’Amérique du Sud, déclare la guerre au Nord, déclenchant toute la trame. Il semble prêt à tout, prétextant le passé des Noirs, dont il est, pour se venger. C’est bien évidemment une allusion à Toussaint, influençant fortement Saul, et reproduisant ce qui se passe sur Terre, dans un sens. Ses motivations de guerre ont sans doute à voir avec son passé terrestre ou limbique, quelque chose s’étant possiblement passé aux Terres Basses…

 

François, l’homme simple issu de la ruralité, travailleur honnête, Rastignac dans la mégapole parisienne, souhaite devenir chimiste agricole. C’est un mélange entre Dodji (le bon guide) et Saul (le travailleur acharné en quête de réussite, déçu, trompé).

 

Blanche, amie d’enfance de François, rêve de faire carrière dans le mannequinat et le cinéma. Elle et François sont amoureux. François croit la perdre à tout jamais lorsqu’elle se marie avec Jérôme. Elle sera frappée d’un mal mystérieux lors de la guerre, et même blessée dans les émeutes, mais sera finalement sauvée. On ne peut qu’y voir Camille, qui rêve de briller, amoureuse de Saul, séparée de lui plus ou moins volontairement, frappée d’un mal mystérieux, blessée… Elle a dû mourir de manière atroce sur Terre, durant la guerre, et a besoin d’extérioriser sa souffrance et sa haine dans les Limbes, via son nouveau rôle d’Elue des Terres Basses, sa duplicité personnelle.

 

Jérôme, riche producteur de films et dirigeant de médias, sans scrupules, prêt à toutes les perversions pour arriver à ses fins et éliminer ses rivaux. Il est lui aussi amoureux de Blanche, et détruit la vie de François pour l’écarter de lui. Il manipule ainsi Blanche pour la forcer à l’épouser. Il incarne très bien Melchior, sans doute lui-même le père d’Yvan, richissime, à la moralité faible, d’une jalousie et d’une avidité sans limites, au point de vouloir désirer la jeune fille malgré son âge ? Que s’est-il passé ce soir-là ? Il a sans doute détruit la vie de Dodji ou de Saul pour obtenir Camille, sur Terre comme dans les Limbes, en la transformant et en la forçant à son service (fin du tome 9), la piégeant, et donc la détruisant également. Koupchou sait peut-être quelque chose à ce sujet, en tout cas, elle, elle en sait un rayon. Melchior semble prêt à tout pour la posséder.

 

Mme Vélin, la concierge de François. Un côté Charlie, style celui qui le connaît le mieux.

 

Les premiers compagnons de François. Les compagnons de Dodji.

 

Le Docteur Fauque, médecin de l'expédition. Un futur Octave ?

 

Colette, fille du Docteur Fauque et amante de Teste, l’un des compagnons. C’est la seule relation mentionnée, on peut y voir celle qui a unilatéralement cours entre Zoé et Yvan.

 

Paul (futur époux de la fille de François et futur chef de la communauté), lui-même descendant de Narcisse, l’un des compagnons. Il incarne le futur et l’espoir, en ayant appris auprès des bonnes personnes. Les modèles sont donc importants. Il incarne avec Denis la génération qui vient, mais la positive, la bonne continuité, et non pas l’inverse, incarnée plutôt par l’autre. Paul pourrait être représenté par la « nouvelle génération limbique » : Lex, Zéphyr, Annette, Terry… 

 

Denis, symbolisant la menace toujours présente lorsque des sociétés équilibrées se mettent en place, le refus d’écouter l’ancienneté, la jeunesse manipulée, l’éternel retour du progrès. Terry ?

 

 

D’autres choses présentes dans Seuls apparaissent aussi dans Ravage : l’idée des abattoirs, des belles choses systématiquement entachées de danger, de violence et de dégoût, la destruction morale, le retour de la mort, omniprésente.

 

La conclusion de Ravage (et de Seuls ?) tient plutôt du tragique : la technologie tente de revenir en douce, et le Patriarche, énervé et menaçant, rappelle le passé et ses horreurs au jeune ambitieux Denis. Ce dernier le tue en retour, alors que François est plus que centenaire ; la violence est de retour. La continuité politique sera heureusement assurée par Paul, un homme qui a appris auprès de François et qui est aussi sage que lui. Ainsi peut-on éviter les défaites du passé en formant et en écoutant. La sagesse reste la meilleure des voies.

Dodji périrait-il des mains des plus jeunes ? Mais celui qu’il a formé reprendrait les rênes. Peut-être sera-t-il convaincu, à terme, du bien-fondé de l’anti-progressisme des Songe-Creux ?

 

 

C’est ainsi qu’il n’y a ni utopie, ni dystopie, mais simplement la survie, et la bonne, l’intelligente, la common decency d’Orwell.

Privilégier le progrès moral avant le progrès technique. Mais comment faire ?

 

Quant à Fahrenheit et les autodafés, Seuls l’a suffisamment illustré. La connaissance, incarnée par Camille, est vitale. Mais Saul ne l’entend pas de cette oreille, et fonce, tête baissée, répétant les mêmes erreurs et horreurs du passé.

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