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Des histoires de Seuls
De Malike — 4 avril 2024 à 21h31
[OCs] L'inaction
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Bon c'est de la grosse tentative et c'est pas très relu aha, j'espère que ce ne sera pas trop OOC. Je me posais une certaine question et ce texte est une tentative d'y répondre, en partie ?

 

- Bien. Nous allons pouvoir commencer. Je vous remercie d'avoir répondu à mon appel malgré les risques que les réunions indépendantes courent en ce moment. J'ai veillé à la sécurité de ce lieu, mais j'ai conscience de la pression que ça vous met. Avez-vous des questions concernant la convocation ?

Une main se lève dans le groupe.

- Oui ?

- Je ne suis pas certaine de comprendre l'intérêt de notre réunion. Je suis venue parce que votre message m'intriguait, mais je vois que nous sommes... entre Magisters, civils comme guerriers compris, si je saisis bien ?

- Vous rentrez tout de suite dans le nerf de la guerre... Pas étonnant pour une médic, si vous me passez le trait d'humour. Comme l'affirme le docteur De Sousa, et comme vous pouvez le constater de vous-mêmes, j'ai réuni dans cette pièce divers membres de la Cinquième Famille. Nous avons un deuxième point commun, en plus de notre ordre : aucun n'est directement connecté aux décisions gouvernementales néosaliennes, ni à Saul lui-même. La raison de ce choix est simple : après l'évasion de masse des Sans-Noms à laquelle nous avons tous assisté - presque tous, certains ici présents étant en campagne au moment des faits - une innocente réunion pourrait passer pour un étrange conciliabule contre le régime. J'y vois personnellement au contraire, l'occasion de mettre en application notre devoir envers les Familles, nonobstant les méthodes de l'Imperator.

- Sauf votre respect, lieutenante Fikriye...

- Je ne suis que sous-lieutenante. Mais continuez, je vous ai coupé.

- Hm, très bien, sous-lieutenante... sauf votre respect, qu'est-ce que vous attendez de nous, au juste ?

- En tant que Magisters, nous avons un devoir envers le peuple. J'aimerais savoir si chacun ici est prêt à l'accomplir.

- ... celle-là je l'ai pas entendue souvent. Et l'Éternité sait ce qu'on a pu me balancer.

- Je ne réduis aucunement vos exploits, Commandeur. Ma question vise aussi à vous bousculer et à vous interroger.

- Vous faites pas de bile, il en faut plus pour m'énerver. Par contre, pas d'histoires d'"exploits" entre nous. Vous plus que n'importe qui, vous devriez savoir que ce qu'on commet à la Centurie n'est qualifié de glorieux que par ceux qui n'ont jamais posé un orteil sur le champ de bataille.

- C'est noté.

- Qu'entendez-vous par notre "devoir" ? À titre personnel, je suis profondément honoré de pouvoir rencontrer d'autres membres de ma caste aujourd'hui - la plupart d'entre vous ont une renommée qui s'est étendue jusqu'à Magopolis, après tout. Mais en tant qu'archiviste et tuteur, il me semble exercer mes compétences telles qu'on s'y attend. À moins que vous n'envisagiez de former une faction, ce qui est tout autre chose.

- Faction ou non, ce n'est pas le sujet de notre discussion aujourd'hui. Je m'interroge réellement sur notre devoir, monsieur Asagao. Qu'on soutienne Saul ou non, force est de constater que sa politique a conduit jusque-là à la débandade de Sans-Noms, ce qui a eu un impact direct sur le peuple néosalien. La paix, l'économie et la stabilité de bien des foyers s'en est retrouvée heurtée, et ce qui devrait être une priorité majeure pour l'Empereur se retrouve négligé au profit de la guerre, que ne mèneront ni les Sans-Noms, ni les Eveillés, ni l'essentiel des Eclaireurs. Dans cette ambiance instable, la peur et les violences règnent, et le pouvoir n'en a que faire. Les Magisters du conseil et leur garde se concentrent sur  les stratégies de notre Empereur face à nos adversaires, et ne peuvent pas s'attarder sur ce qu'il se passe pourtant devant leurs yeux ; quant aux Sages, qui étaient notre dernière ressource politique, ils semblent plutôt se préoccuper de ne pas passer eux-mêmes pour des traîtres. Maintenant, je vous interroge, tous : que faisons-nous, de notre côté, nous pourtant Magisters ? Ne voyez pas dans cette question une dévalorisation sarcastique de vos actions : chacun d'entre nous se rattache à un devoir qui le consume, qui est l'origine de chacun des cheveux blancs présents sur son crâne. Mais soyons honnêtes avec nous-mêmes : cette énergie que nous dilapidons pour des vocations et des activités professionnelles néglige un point essentiel de notre statut. Nous avons une autorité, nous avons, de droit, une place hiérarchique qui pourrait sauver des vies à plus grande échelle. Archiviste, doctoresse, gardienne de cimetière, conseillère militaire... Je ne parle pas pour le commandeur Stephenberg ici présent, dont le devoir revêt une charge et une importance toute autre, mais pour vous, vous trois assis face à moi, en réalité... nous en sommes réduits à oeuvrer comme des civils. Celui qui a un Sept au cou serait mesure de nous remplacer, la différence réelle réside dans le degré de compétence. Croyez-vous réellement que demeurer dans ces places servira autant le peuple que ce que nous pourrions faire si nous revendiquions notre rang ?

Silence.

- Je ne suis pas si je peux réellement adhérer à votre discours, sous-lieutenante Fikriye, finit par intervenir De Sousa, bras croisés. Exercer une profession à elle seule, en dehors de toute action plus politisée, ne revient pas à réduire ou annuler notre impact. Interrompre mon activité de doctoresse militaire était un choix. J'ai commencé à pratiquer dans un contexte de guerre, et quand celle-ci s'est achevée, je n'ai pas souhaité suivre des troupes qui agissaient non plus dans un but de défense, mais de conquêtes de territoires, voilà tout. Mon devoir m'appelle auprès de civils, et les civils requérants mon aide sont ceux souhaitant apprendre le métier et ceux confrontés aux blessures du quotidien. Je ne suis déjà pas certaine d'apprécier vraiment le comparatif de compétences entre mon activité et celle d'un membre du peuple des Familles du "dessous", mais de plus, je ne vois pas comment ce que vous proposez pourrait rentrer en phase avec mon éthique de travail.

- Chacun fait ses choix, opine Joseph depuis sa place, son unique oeil focalisé sur le cran de son arme. La Centurie est le rempart de la paix du peuple ; cette dame ici est le rempart des inquiétudes internes les plus banales.

- Où se situe votre éthique de travail, docteur de Sousa ? murmure Fikriye sans se départir de son calme. Vous qui agissez pour le peuple, ne voyez-vous pas justement que les dégâts se multiplient à l'heure actuelle ? Je ne vous demande pas de tenir une tribune pour justifier vos choix, ni de vous éloigner de ceux dont vous prenez soin chaque jour - et je ne vous dis certainement pas de mépriser ceux qui font le même travail que vous, à rang moins élevé. Je vous demande si vous vous contentez, vous, doctoresse, et Magister de surcroît, de soigner un empoisonnement généralisé comme s'il s'agissait des blessures habituelles, plutôt que d'aller voir où est la source pour endiguer les dégâts à cet endroit. C'est ça, le problème que je vous pose. Encore une fois, à quoi bon être Magister si c'est pour se voiler la face sur nos possibilités ?

- Si j'peux me permettre... je peux pas parler en défaveur de Fikriye pour ce coup-là. Depuis que tout ça a commencé, la quantité de morts que j'enterre crève le plafond. Je doute d'être utile à bien plus, mais cette vérité-là, je peux bien vous la dire. Je n'ai jamais eu autant de victimes de Mort-Dernières. Aucun Passé au Mal, et je crois même pas pouvoir imputer une seule de ces morts aux Dernières Familles.

- J'ai une question, intervient Ayame. Comment voulez-vous qu'on fasse, au juste ? Vous dites qu'il ne s'agit pas de former une faction, mais revendiquer chacun notre autorité du jour au lendemain ne peut pas se faire sans être remarqués de Saul ou du conseil. De plus, quelles actions concrètes pourrait-on mener pour renverser la tendance ? Il serait trop dangereux d'essayer de défaire la source du problème, et j'ai le sentiment que vouloir à tout prix apaiser tout un chacun sur la situation actuelle ne serait qu'agir en complicité avec l'Imperator. Certes, je n'essaierai pas de détrôner Saul, mais dire que j'adhère à sa politique serait une exagération.

- Nous avons déjà une place, Asagao. Il ne s'agit que d'étendre notre impact, ce qui ne sera pas remarqué comme une tentative de renversement, puisque nous ne chercherons pas à bousculer le pouvoir mais à appuyer le peuple. Et Saul a besoin de son peuple pour garder la prise sur ses facultés, donc j'ai un doute sur le fait qu'il voit ça d'un mauvais oeil ou nous interdise d'agir. Je ne nie pas qu'une certaine méfiance sera probablement exercée envers nous au départ, mais il s'agira de jouer nos cartes dans la légalité. J'ai peut-être été résistante dans une vie antérieure, mais notre situation actuelle requiert des actes bien différents. Enfin, j'aimerais que vous me compreniez. J'ai de l'estime pour vos actes, quel que soit leur degré. J'interroge seulement la direction qu'ils pourraient prendre. L'inaction est un choix. Et c'est un choix que certains d'entre vous ont fait.

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